News du parc ! L'écologie verticale par Cédric Dentant - English

Nous poursuivons notre série News du Parc avec Cédric Dentant, botaniste pour le Parc national des Ecrins depuis 2009.

Cédric arpente les arêtes et faces rocheuses du Pays des Écrins afin d’en répertorier les espèces végétales qui y poussent.

Cette présence verticale a permis depuis lors des découvertes incroyables…

Comment fait-on pour étudier ces espèces qui vivent parfois sur une arête rocheuse ou au sommet d’une paroi ?

La seule méthode pour réaliser ces inventaires, c’est l’alpinisme ! Il faut être autonome dans cette pratique, dans la connaissance du milieu et bien sûr être deux (une cordée). En général, je vais en montagne avec Sébastien Lavergne, chercheur CNRS au Laboratoire d’écologie alpine de Grenoble.

Avez-vous réalisé des inventaires dans les Ecrins ?

Bien sûr, on a trouvé la saxifrage à feuilles opposées, la saxifrage musquée et la linaire alpine sur le Pilier Sud de la Barre des Ecrins, les Ailefroides ou encore les arêtes du Glacier Blanc ; mais aussi la renoncule des glaciers, l'éritriche nain l’androsace pubescente sur les arêtes de Sialouze et sur le Pelvoux.

Quelles sont les particularités de ces milieux de haute altitude?

On compare souvent la haute-montagne à un désert. En effet, c’est un milieu extrême où règnent de grandes amplitudes thermiques, des gels et des dégels continus, un enneigement très long, une absence de sol, et une intensité de radiation lumineuse aussi forte que dans les tropiques.

En 2012, on a pu établir un record d’altitude pour une espèce, la saxifrage à feuilles opposées qui vit à 4070 m sur la Barre des Ecrins ! On a également découvert depuis 2009, plus de 80 espèces qui vivent à plus de 3500 m d’altitude. La littérature liée à l'alpinisme indique encore bien trop souvent que la haute-montagne est un désert où rien ne vit...

Et est-ce que cela implique également des particularités chez les espèces ?

En haute-montagne, il faut à la fois attirer des pollinisateurs d’où l’intérêt d’être très coloré ; résister aux froids et aux sécheresses extrêmes, il peut y avoir jusqu’à 50°C d’amplitude dans la journée ; mais aussi résister à l’hiver, la neige est un excellent isolant thermique et si on perd de l’enneigement, on perdra une protection pour les bourgeons…

Par exemple, la saxifrage à feuilles opposées est en coussin. Cette forme ronde de développement est un optimal évolutif car le rond constitue un volume optimal pour une surface d'échange avec l'extérieur minimale. Cela implique une limitation des pertes en eau, une régulation de la température (il fait souvent 20°C de plus dans le coussin qu’à l’extérieur) !

La haute-montagne est un véritable berceau pour la spéciation, c’est-à-dire la création de nouvelles espèces.

 

Pour en savoir plus, voir aussi :

- Le journal de bord de Noëmie et Aurélien (refuge Adèle Planchard) – Avril 2016

- Dod, au soleil des Écrins... et en mission scientifique ! Juillet 2014

- La recherche aux sommets – Août 2010

- Quand les alpinistes s'intéressent à la botanique - Septembre 2014